Cette semaine, en parcourant la presse comme je le fais chaque matin, je suis tombé sur un article, qui, je le concède, m’a mis un peu en rogne …
Plus que d’usage…
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« Un nid de Gravelots à collier interrompu protégé par un filet a été détruit volontairement dans la nuit du 9 juillet 2023 sur la plage de la Maïre à Sérignan, dans l’Hérault. Cette année, 23 nids ont été vandalisés sur le littoral biterrois.
Les trois œufs de Gravelots à collier interrompu étaient pourtant protégés par un filet et entourés de cages. Dans la nuit du 9 juillet 2023, les malfaiteurs ont déplacé la cage de protection pour écraser les œufs. Un acte de vandalisme qui scandalise l’association qui œuvre pour sauvegarder l’espèce menacée. Il ne reste que 1500 spécimens en France »
Je suis d’un naturel paisible, mais quand on m’en fait trop je peux à l’instar de Raoul Volfoni.. m’énerver.. C’est sans doute anecdotique et même ridicule si on songe au contexte actuel de notre monde… où pour paraphraser… l’eusses tu cru.. ? .. ça part en nouilles..
Mais c’est vrai… ça m’a interloqué … une grande incompréhension,..
Franchement, aller déplacer des cages de protection, juste pour piétiner les œufs d’un pauvre piaf qui fait comme il a toujours fait… pondre sur le sol. comme ça.. sans même chercher à se planquer..
Et voilà une espèce en voie de disparition.. si c’était le vœu de la nature, le souhait du grand manitou, il ya longtemps que ça aurait été fait.. mais il y a une chose à laquelle la nature n’a pas songé.. la connerie humaine….
C’est vrai , pondre ses œufs comme ça. .. sur le sol.. en se disant « je vais faire l’oiseau blessé pour éloigner le malfaisant.. » ça leurre et ça s’inscrit bien dans les desseins de mère nature… si on ne tient pas compte de l’accident de l’évolution.. l’homo connardus…
Parce que là le bug.. il est balèze… commack..
Eh oui Michel… ça ose tout.. c’est à ça qu’on les reconnait..
C’est sûr que la méthode (si on peut dire) de ce petit oiseau est bien aléatoire…
Il y a quelques années sur la plage à Etel, alors que nous allions passer un après midi tranquille à tester le parasol.. au moment où nous étions prêts de nous installer…
Un petit oiseau s’est mis à faire des ronds.. battre de l’aile.. claudiquer… bientôt rejoint par un second..
Le couple cherchait a nous éloigner de son nid..
Deux œufs posés comme ça.. sur cette frange où la houle d’hiver a laissé des amas de débris secs.. algues, brindilles.. et autres déchets
J’ai planté deux morceaux de bois, nous nous sommes éloignés et à chaque nouvel arrivant j’ai signalé le nid..
De retour à la maison j’ai téléphoné à la LPO ..
Le lendemain quand nous sommes revenus, le nid était entouré de piquets avec un ruban plastique et un petit panneau explicatif sur le gravelot à collier interrompu..
Je ne sais quel Ulysse local a égratigné un Polypheme Breton, mais quelques jours après.. un gros coup de vent.. des grosses vagues.. un coup de tabac..
Dans la nuit en entendant les fils électriques chanter, j’ai pensé à l’oiseau..
Nous sommes retournés sur la plage quelques jours après.. elle était aussi lisse que la chevelure gominée d’un danseur de tango..
Lisse.. rien.. pas une empreinte de pas .. pas un morceau d’algues, de bois de varech.. rien..
Un tas de sable.. nivelé au grain près..
Bien sur il ne restait plus rien du petit fortin dérisoire de la LPO..
C’est idiot.. mais ça m’a peiné..
Imaginer le désespoir de ce couple de petits oiseaux.. impuissants face à ces tonnes d’eau..
Il y a tant d’adversité à vaincre pour que les petits puissent voler de leurs propres ailes..
C’est si rude.. si dur..
La nature n’est pas charitable pour ces bestioles..
Et voilà que des… je n’ai pas le mot.. mus par je ne sais quelle pulsion.. ..
Je ne vais pas philosopher.. je confesse que ça n’a pas été ma matière salvatrice pour le bac.. ni psychanalyser.. chacun son taf..
Mais il me semble qu’il y a chez certains des cheminements de pensées qui manquent de panneaux indicateurs..
C’est parfois leur surnom, chicaneurs, brailleurs, voleurs.. ils sont prêts à tout ingurgiter.. à se battre. à voler le gâteau ou la tartine de pain entre les mains d’un enfant.. peur de rien.. intelligents.. observateurs..
Beaucoup veulent les associer à la mouette.. dès que l’on voit un oiseau en bord de mer.. ahhh une mouette..
Aussi faux qu’appeler pingouin un manchot.. Ce sont les goélands argentés.. œil vif.. bec jaune avec une tache rouge.
Tous les gens de ma génération se souviennent du film…
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Comment traiter de rats du ciel.. un oiseau au vol si pur.. si maitrisé.. quand la mer se gonfle.. devient agressive en lames énormes.. vertes dans le soleil , qui viennent se fracasser sur les rochers dans une gerbe effrayante de puissance..
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L’oiseau a disparu .. la vague l’a happé..
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Mais non.. il est là.. il s’est cabré .. tiré sur le manche comme un pilote de Spitfire..
Il est au dessus.. jouant du vent … son allié.. qu’il domine.. sans un battement d’aile il remonte.. vire à droite.. reprend son axe..
Traiter ces oiseaux de rats des mers..
C’est vrai.. les décharges à ciel ouvert.. geste d’amour de l’homme pour la nature les a transformés en opportunistes..
C’est plus facile d’aller gratter dans ces immondices..
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que chercher l’étoile de mer.. ou aller attaquer un autre oiseau..
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Il est si beau en vol.. immobile face au vent.. ajustant sa stabilité en poussant quelques rémiges.. il tourne.. monte..
On voit sa tête qui bouge à droite.. à gauche.. cherchant.. guettant..
Le rêve de l’homme.. voler.. Pilate de Rosier.. Clément Ader..
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Aujourd’hui nous en sommes au biomimétisme.. l’aile de mouette a inspiré les planeurs.. l’aile de mouette inversée des avions tristement célèbres.. les Stukas..
Nous en sommes encore loin de l’aile de l’oiseau.. chef d’œuvre de technologie ou chaque plume a une fonction..
Les rémiges nous ont donné les winglets.. pour diminuer la trainée et économiser le carburant..
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Airbus nous promet un futur avion avec des plumes…
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Je n’aime décidément pas trop le surnom « rats du ciel ».
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De ma fenêtre ici.. je les vois se battre pour un réverbère.. toujours le même.. il y en a beaucoup sur la rue, mais c’est celui là.. chacun veut s’y poser.. jusqu’au moment où arrive celui qui se l’est attribué.. ça s’envole en rouspétant.. et IL se pose.. s’ébroue.. range ses plumes.. regarde à droite.. à gauche.. imbu de sa hiérarchie..
« mon fief », doit-il se dire… comme Jonathan disait « mon ciel ».
Ayant affirmé sa suprématie.. vite lassé.. il se déploie.. et s’envole.. passe au ras du mur pour aller se poser sur le toit..
Rats du ciel.. misère.. le rat se cache le jour.. sort la nuit..
L’oiseau lui , nous offre sa beauté.. son vol.. son habileté à se jouer de la vague ..
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Ce petit souffle quand il passe à quelques mètres au dessus de nos têtes..
C’est sûr que leurs ancêtres, c’était pas la même chanson, et puis à l’époque, on avait trouvé autre chose pour le dilatoire.. le jour où les poules auront des dents, tu m’étonnes…
Les oiseaux, ils ont de quoi revendiquer en terme d’ancêtres, le tyrannosaure, 8 tonnes, des crocs de 15 cm, quant à la cuisse, fallait la bassine à frire commack pour faire les trucs grillés dont je connais mal le nom.
Comment ça a pu finir en petit truc tout mignon, avec de l’orange sur le poitrail, si léger, si fragile qu’on dirait que le moindre souffle de vent. ..
Certes, si les hommes n’avaient pas eu cette flamme destructrice, on en aurait encore des gros.. des balèzes.. les moas, les dodos…
Restent encore les oiseaux coureurs.. autruches, émeus, nandous.. ou les grands voiliers.. albatros, condor, etc..
Mais comment en sont ils arrivés là.. Si l’homme évolue de la même façon
on va se retrouver avec une grosse tête, et des jambes toutes fines, grosses tronches et cannes de serins..
D’un autre côté, s’ils étaient restés comme au départ, je ne serais pas là à pianoter un texte pour Mo.
Car nourrir un gros reptile du mésozoïque, à mon avis, ce ne sont pas trois graines dans la main qui eussent servi de casse-croûte.
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Image du net
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Et pourtant, si petits, si doux, ils viennent, près, très près, même dans la main.
Confiance, inconscience… je préfère leur prêter le sentiment de la confiance.
Quand nous nous sommes installés avec Mo, quand nous sommes passés à la phase aménagement du jardin, j’ai creusé les allées, pour y couler des plaques de béton, des pas japonais grand format.
En creusant je mettais à jour des vers et autres délices.
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Merlette du jardin
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A cette époque les merles n’étaient pas encore décimés par le virus, et une petite merlette avait vite remarqué que la pioche et la brouette signifiaient ‘’casse-croûte’’.
Petit à petit elle devint plus hardie, envahissante, à chaque fois que je sortais la brouette elle arrivait je n’ai jamais su comment elle était avertie.
J’avais dû constituer une petite réserve de vers pour ne pas la décevoir car il arrivait que je sorte la brouette sans idée de creuser.
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Tant et si bien que je m’asseyais et posais un petit ver à côté de moi.
Elle s’approchait doucement, hochant la tête, la mettant de côté, jaugeant, estimant.. hésitante, me fixant de son œil rond.. prenait son courage à deux ailes et, vive, attrapait le ver dans son bec en s’éloignant un peu pour remettre de la distance entre nous.
Et vint un jour où elle resta près de moi.. à prendre le vers entre mes doigts..
Elle me suivait partout.. il y a encore l’empreinte de ses pattes dans le ciment..
Certains pourront juger cela ridicule, mais je suis étreint devant une telle confiance.
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Bulbul mauricien confiant
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En vacances dans le grand sud, c’est même dans la main ou carrément dans le plat que venait ce pillard de bulbul..
Un seul fut courageux au point de se poser dans le creux de ma main.
Les autres s’approchaient mais ne franchissaient pas l’état de la confiance totale.
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Bulbul mauricien totalement confiant
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C’est une grande émotion, sentir le petit bec qui tape dans le creux de la main, les griffes sur la paume.. sans même jeter un regard voir si des fois l’envie me prendrait de serrer..
Ce sont des moments uniques.. où l’on voit qu’on aurait pu avoir une autre histoire avec les animaux…
Pourtant pour en arriver là où nous en sommes l’homme ne s’est pas contenté de racines (comme j’apprenais gamin à l’école, « l’homme préhistorique se nourrissait de racines », et moi pauvre pomme je voyais le mec en slip de fourrure sur les miches penché au bas d’un tronc en train de gratter la radicelle)..
J’avais même pas songé qu’avant d’être un slip.. c’était une bestiole.. hé.. le slip kangourou de l’époque portait bien son nom..
Pas simple..
Reste qu’il y a des moments comme ça.. forts.. émouvants.. où une petite bestiole si menue, accorde sa confiance ..