Archives de la catégorie ‘Prose à Marc’
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Ma mère possédait un trésor…
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un trésor qui se transmettait de filles en filles.. d’épouse en épouse.. de mère en mère..
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Une machine à coudre Singer..
Si j’en juge par les caractéristiques et les photos trouvées sur Internet elle devait dater des années 1910.. Ce qui pourrait coller avec mon arrière grand mère qui servait chez les bourgeois, comme on disait, et qui faisait des travaux de couture.. En tout cas c’était le trésor.. son trésor. Elle en brossait régulièrement les pieds tourmentés en fonte noire.. astiquait le coffre en bois qui protégeait l’instrument et se lamentait d’avoir perdu la poignée du tiroir.
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A cette époque, la seule soie dans laquelle on pouvait se soulager était celle des patrons du « Petit Echo de la Mode ».. et encore.. Mon grand père qui devait souffrir d’une délicatesse qui n’était sans doute pas sans fondement, exigeait qu’on lui apportât ces précieux morceaux de soie car son royal derche ne supportait pas le papier journal.. donc je n’ai jamais pu expérimenter ce plaisir indicible de la réussite. (je ne connaissais pas la Rolex et la limite d’âge associée).
Ce petit journal fournissait à ma mère l’occasion de montrer son talent : « Premier prix d’éducation ménagère du canton me lâchait elle à chaque fois en riant.. ». Et donc elle faisait ses créations à partir des patrons de soie que ce journal proposait à chaque parution. De toute façon, avant son crépuscule, je n’ai jamais vu ma mère assise à ne rien faire.. jamais.. la pauvre.. au mieux elle tricotait.
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Sur la grande table en bois recouverte d’une toile cirée de la cuisine.. on sortait « la boite à couture » avec les aiguilles, la craie plate, et cette énorme paire de ciseaux que je pouvais juste effleurer des yeux et qui faisait chanter la table et le tissu quand ma mère.. appliquée, sérieuse.. sa mèche sur le front suivait le tracé crayeux.. « crout crout » .. ça résonnait sur la table.. « crout crout »..
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Ensuite venait le bâti.. c’est presque la pièce.. mais pas encore.. c’est cousu à gros points.. lâches.. fragiles.. Mais ça permet de se rendre compte..
Quand la pièce était jugée digne de passer à la phase suivante, on sortait la machine.. ma mère cherchait dans la boite le fil qui correspondait au tissu.. elle me levait un regard interrogateur en posant le bobineau sur le tissu.. voir ? j’acquiesçais..
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Navette
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Ensuite j’avais droit à préparer la navette.. mettre le petit support entre les deux pointes.. passer le fil de la bobine dans l’œilleton et ensuite pédaler, un pied en haut à gauche sur le plateau.. l’autre en bas.. Et pédaler, pédaler.. le petit bras circule dans un sens et dans l’autre guidant le fil de façon régulière.. pas trop le remplir.. mais suffisamment.. puis placer ce petit cylindre dans la navette.. un truc bizarre qui me faisait penser à un suppositoire en métal.. pourvu de fentes ..
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Y passer le fil.. mettre le tout dans le réceptacle sous l’aiguille.. Placer la bobine sur son support.. faire cheminer le fil dans les différents trous.. bras.. puis.. après l’avoir humecté du bout des lèvres, le passer dans le chas de l’aiguille.. Pas facile.. petit le trou.. gros le fil.. Tirer un peu.. en haut.. en bas sur celui de la navette..
Tout cela réalisé..ma mère s’installait tel un pilote d’avion.. vérifier le tissu.. poser à plat sur les petits crans d’avancement.. abaisser le pied de biche.. caler les pieds sur le plateau… on pose doucement la main sur le volant au bout de la machine..
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Un petit coup d’élan.. la courroie en cuir se tend…et « rrrraaaaa tacttttt » c’est parti.. il faut surveiller.. guider.. le tissu avance.. vite.. la bobine danse sur son axe… « rrraaaa » on avance.. on pourrait en faire des mètres.. il faut que ce soit régulier.. bien suivre le bâti.. les morceaux cousus.. on tire un peu.. « rrrrrrrrrrrrr » et on coupe les deux fils.. « Ahhh non.. avec des petits ciseaux.. pas les gros… »
Elle nous en a fait des choses avec sa machine notre Maman..
Quand mon père nous a quitté à son tour, et que j’ai dû faire les démarches.. pour calculer les taxes et autres prélèvements, le notaire nous a évalué un forfait mobilier énorme.. je ne me souviens plus mais mes pauvres parents n’ont jamais eu en mobilier la somme indiquée.. loin de là.
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Le buffet Henri II de ma grand mère ou une chambre à coucher de chez Levitan (des meubles garantis pour longtemps) bref, à son grand désarroi au notaire, j’ai demandé un expert pour estimation.. faut payer bien sûr.. mais au moins..
Ayant dédaigné le buffet Henri II .. qui ne vaut rien… je pensais l’entendre s’exclamer devant la machine à coudre.. « 5 ou 10 euros » l’a-t-il estimée.. eh oui.. le trésor de ma mère.. ne valait rien.. hormis l’affectif.. ce qu’il représentait .. le vecu.. rien, nada.. que dalle.. roupies de sansonnet.
Ma sœur qui vit de l’autre coté de l’Atlantique m’a demandé de lui expédier la machine.. là, par contre.. c’est pas donné..
J’ai démonté avec soin la machine.. j’ai tout bien mis dans un carton spécial (les US ne veulent pas de caisses en bois.. ils nous ont filé le feu bactérien dans un sens.. alors pas de réciprocité ) .. Et j’ai expédié. Le trésor de notre Maman est donc là-bas.. en Caroline du sud..
Avec elle, les souvenirs, les images, Mo m’a demandé de faire un petit texte, alors je pioche dans mes souvenirs.
C’est étrange, mais plus on vieillit plus les souvenirs anciens reviennent à la surface, des choses simples.. vécues par beaucoup.. rien d’extraordinaire. Les objets s’y mettent.. ils veulent leur part .. Si cette machine pouvait parler.. depuis qu’elle a quitté l’usine.. elle a dû en entendre des choses.. en subir.. Des belles et des moins belles..
Moi, c’est ma Maman, penchée sur la machine.. la petite mèche s’échappant de la petite pointe de cheveux qui descendait sur son front .. se relevant toute fière de sa couture qu’elle tendait à bout de bras.. pour savourer..
Allez bon.. reviens mon gars.. pas mollir.. va regarder le rugby..
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Marc
PS : contrairement à ce que pensent les Américains, ce n’est pas Singer qui a inventé la machine à coudre, mais un Français nommé Thimonnier en 1830
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J’ai été Savoyard..
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eh oui.. gamin né à Paname, envoyé en altitude pour se refaire les bronchioles abimées par l’insalubrité du logement de la rue des Gravilliers….
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Mionmaz Seyssel
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Je me suis retrouvé dans un petit bled.. lieu dit.. Mionnaz .. du coté de Seyssel avec mes parents .. nous avons dû y passer plusieurs mois..
j’ai encore en tête les noms que j’entendais alors : Seyssel, Rumilly, Gorges du Fier…
Ma mémoire est défaillante mais des images me reviennent, notre bâtiment était plus en arrière de la route.. avec d’autres bâtisses,
le tout formait presque une place avec l’abreuvoir..
et dans un coin, un arbre qui m’est apparu immense et qui donnait des petits fruits noirs.. violet foncé.. qui tachaient sol, mains, vêtements..
mais avec un parfum..un parfum.. jamais je n’ai retrouvé cette odeur.. jamais.. que ne donnerais-je..
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Un murier noir avait dit mon père..
C’est vrai que j’ai encore des souvenirs olfactifs.. cet arbre et la pureté de l’air que nous respirions,
j’avais l’impression qu’il me gonflait la poitrine.. me donnant un sentiment d’invincibilité..
Je retrouve un peu cette sensation en Bretagne quand je sors le matin.. un air qui gonfle les poumons.. que l’on sent aller jusqu’au plus profond de soi..
Rien à voir avec ce que je ressens en banlieue quand j’ouvre les volets à la fraiche.. faut être franc.. ça daube.. pardon, c’est méphitique.
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Toujours est-il que nous étions hébergés dans une grange aux murs couverts d’ampélopsis, refaite en appartement…
Il y avait du bois partout.. du sapin fraichement raboté qui embaumait..
Mais le soir, sortant de leurs abris, des araignées grandes comme des soucoupes…
Les propriétaires vivaient à côté.. dans un vieux chalet.. l’étable à côté de la cuisine..
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L’ancien se baladait avec une corneille apprivoisée sur l’épaule.. qui, outre des coups de bec affectueux,
lui lâchait de bien belles médailles sur sa veste en gros velours côtelé.
Passée la période d’acclimatation avec le fils du maréchal ferrant.. après les rituels « parisiens tête de chien » ou « parigot tête de veau »
auxquels je répondais par un « savoyard tête de lard »..
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nous devînmes bien potes passant des heures à jouer dans l’abreuvoir où, à l’aide de demis rondins accrochés par des clous cavaliers,
on jouait aux navires, voiliers et autres aspects maritimes bien étrangers à ces montagnes .
Ou bien nous allions ravitailler les gens qui travaillaient aux champs.. mon interrogation la première fois où on m’a dit.. ramène moi une chopine..
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Certes je souffrais le martyre quand son père approchait le fer juste sorti de la fournaise du sabot du cheval..
la fumée.. l’ odeur de corne brulée.. le cheval qui tressaillait à peine de la jambe..
et bientôt.. les clous.. à grands coups de marteau.. les pointes tordues ensuite sur le côté.
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Les bœufs me faisaient plus peur.. d’abord c’étaient des bêtes à cornes.. avec leur voilette sur les yeux..
et puis on les engageait dans une sorte de cage en fer.. les fers étaient plus petits.. mais le rituel le même.
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Souvent mon camarade et moi avions pour mission de garder les vaches et les chèvres.
Il y avait une dizaine de vaches et peut être cinq ou six chèvres..
On ne pourrait soupçonner mais certaines de ces bêtes se haïssaient
et je me revois tapant sur le dos d’une vache qui essayait de coincer une chèvre entre elle et le talus..
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Ce qui me fascinait c’était de voir les vaches lâcher leur bouse en marchant..
et là je vais confesser quelque chose qui fait rire Mo (qui m’a poussé à écrire cette confession) mais que je n’ai avoué qu’à peu de personnes..
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Un beau jour avec mon compagnon de bêtises.. nous avons décidé de tenter l’expérience du siècle.. faire comme les vaches..
déféquer en marchant.. une expérience qui pouvait faire progresser nos connaissances…
Nous avons donc enlevé culotte courte et slip.. et courbés vers l’avant.. côte à côte comme nous voyons les bœufs..
mais sans le petit filet sur la tête, faut pas exagérer..
Empreints d’une grande émotion devant une grandissime potentielle découverte..
nous avons poussé notre expérience.. en poussant sur les intestins..!!
Rapidement.. il fallu se rendre à l’évidence.. c’était un fiasco.. une Bérézina.. la bombe tombait sur les jambes..
et pas ronde et fumante dans l’herbe.. Il fallait en convenir c’était loupé et dégoûtant..
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Les jambes maculées et la honte au front nous dûmes aller jusqu’à un coin d’où sourçait un petit ruisseau d’eau glacée..
au milieu des cailloux comme chante le barde.. coin nommé « là bas d’sous »
et qui nous était interdit car infesté de vipères.. honte.. crainte.. mais pas cul propre..
Nous avons été laver notre fondement dans cette eau glacée.. les chaussettes.. les sandales… etc
Assis dans l’herbe avec notre grosse tartine de pain épais savoureux recouvert de confiture de mures..
notre quatre heures comme on disait,
ayant bu notre honte.. nous avons signé un pacte d’omerta..
conclu que non, il n’y avait rien de commun entre les vaches et nous..
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que nous ne pouvions nous libérer de la cahute aux araignées et au papier journal accroché sur le clou..
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C’était il y a longtemps.. dans une prairie pentue de Haute Savoie..
avec au loin la dent d’Oche (et pas d’Hoche comme je le pensais) et le mont Blanc..
Plus tard quand nous parcourions le Queyras le sac sur le dos..
je n’avais plus confiance dans les bêtes à cornes.. avec Mo on faisait un crochet.. mais je n’ai pu m’empêcher d’y penser..
ben oui.. y’a pas d’arbres avec des feuilles.. pas de ruisseau avec des cailloux..
les mélèzes ou les pins cembro.. ça pique.. z’ont pas le choix les vaches…
C’est pour ça que le grand Manitou, dans sa grande sagesse, leur a donné cette possibilité.. caguer en marchant..
mais nous, nous étions condamnés.. non seulement à gagner le pain à la sueur de notre front..
mais à trouver un petit coin.. discret.. et à inventer l’imprimerie pour avoir du papier journal..
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Ceci étant.. je n’ose imaginer les rues des villes.. si d’aventure..
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Marc
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A cette époque, dans notre petite ville.. 8604 habitants,

comme je l’avais inscrit sur mon grand cahier d’instruction civique,
le marché se tenait deux fois par semaine dans une grande rue qui descendait vers la gare.

Je pourrais presque encore replacer les commerçants..
Les étalages se terminaient tout en bas, par un camelot qui vociférait ses annonces :
« pas cent francs.. pas cinquante francs.. pas vingt francs..
eh oui, petite Madame pour vous je rajoute la cafetière, le jeu de tasses.. et s’il y a un défaut.. hop ! »

Il fracassait son assiette au sol.. un débit, un bagout.. le camelot dans toute sa splendeur..
Souvent j’accompagnais ma mère au marché pour l’aider à pousser sa carriole.. que dis, je sa caisse à roulettes.
Par souci d’économies, mon père avait fabriqué avec des planches une caisse en bois, mis un double couvercle rabattant sur les côtés,
quatre roues et un arceau pour pousser qu’il avait dû récupérer sur un vieux landau..
Un coup de peinture grise.. et hop pas besoin d’investir dans une carriole en osier.
L’ensemble pesant déjà au moins une tonne à vide.. les roues fixes n’en arrangeaient pas non plus la maniabilité.. mais c’était comme ça..
Moi, je me demandais comment les dames avec leur panier tressé sur le bras
et leur beau porte-monnaie long et plat avec le fermoir doré faisaient pour faire les courses.
Nous, notre carriole était pleine et pesait comme un âne mort.. hélas, la rue que nous avions descendu à vide, fallait la remonter.
Et là.. fallait pousser… souvent ma mère ponctuait nos efforts en riant et en lâchant.. martelant chaque mot,
« dans un chemin montant .. sablonneux.. mal aisé, six forts chevaux etc etc.. ».

Moi gamin j’aimais bien aller au marché.. en plus il y avait mon amour secret.. une vendeuse beurre œufs fromages..
Ah seigneur qu’elle était belle.. elle me séduisait.. tout dans ses gestes me faisait succomber..
ses cheveux clairs et bouclés.. ses gestes précis pour mettre sur la balance.. sa façon de regarder l’aiguille sur ce fouillis de chiffres.. quelle femme..
Elle Lâchait d’une voix qui me charmait : « trois cinquante.. ce sera tout ? ».
Mais ce qui me fit tomber amoureux furent ses dents.. elle avait un sourire éclatant blanc.. avec deux incisives peut-être un peu grandes..

Mais va savoir.. quel inconscient me gouverne..
j’ai toujours eu le regard attiré par le sourire féminin et les dents éclatantes.. et surtout des incisives un peu grandes..
A cette époque, si les gamins avaient toutes les dents c’était parfait..
si il fallait couronner.. ben c’était « full métal jaquette » ou en or si c’était devant et encore, fallait des sous.
Mais pour le reste.. si ça poussait de travers, ma foi..
J’ai eu combien de copains avec les dents plus ou moins irrégulières.. voire carrément en vadrouille.. c’était comme ça.
Sans doute que la dentisterie n’avait pas le modernisme actuel,
ou alors il fallait aller chez les gens qui avaient des moyens que nous n’avions pas.. ni mes parents ni ceux de mes potes..

Je me souviens, en terminale.. j’ai eu un bon copain.. qui, ayant eu sans doute à souffrir étant petit,
était arrivé en nous disant.. « on m’a surnommé bouche d’égout »
en nous souriant largement pour nous montrer qu’effectivement y’avait des espaces..
chaque dent avait vécu sa vie sans se soucier des autres..
Nous étions déjà bien grands en terminale et, en fait, on ne l’a jamais appelé comme ça..
ce n’était plus le temps des moqueries.. en fait ça nous avait pas fait rire..
Bref, moi du haut de mes 7 ou 8 ans.. j’en pinçais pour la marchande de beurre.. et son sourire..
Il arrivait parfois que ma mère oublie quelque chose au marché..
Pas grave.. avec mon petit vélo à pignon fixe, je velocipedais jusqu’au marchand de patates.. 3 centimes le kilo me semble-t-il ,
mais bien sûr, sans rien dire, je ralentissais devant l’étal du BOF.. afin de voir la dame de mes pensées..

Elle était là, avec son tablier blanc, avec le gros nœud derrière et ses manchettes blanches..
des petites boucles s’échappant sur son front.. et son sourire… ah misère..
Que de regrets de ne pas être plus grand.. de ne pas pouvoir lui avouer combien j’étais prêt à conquérir le monde… à braver Fafnir ..
J’ai soixante quinze berges.. la pauvrette doit se taper ses cent printemps… qu’est devenu son sourire..
Je crois que c’est ce qui reste au fil du temps.. le sourire..
Si j’en juge par certains acteurs ou actrices.. le temps fait plus ou moins ses misères.. mais le sourire reste..
Allez, si tu me lis.. le gamin un peu blond..avec un petit vélo bleu…

qui te dévorait du regard.. sans que tu saches pourquoi.. (« qu’est ce qu’il a à me fixer ce petit c.. ?? » )…
C’était moi.. !!!
Marc
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C’était mieux?
Nous sommes passés à la pharmacie dans la semaine, récupérer nos doses de vaccin anti grippe gracieusement offertes par Dame Secu..
un cadeau pour les vieux..
mieux que la vignette.. je pensais à ça en attendant Mo dans la Twingo, la vignette pour les vieux.. !! Et par association d’idées….
Foutue vignette, c’était dans les années 56/57.. la grippe asiatique.. et puis celle d’après 68, la grippe de Hong Kong..
en fait j’ai eu beau chercher, je ne me suis pas revu faire des trucs spéciaux.. en 57 je prenais le dur pour aller au lycée..
et début 69, je bossais déjà un peu avant d’aller servir la France pour 16 mois..
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Etant môme, je me souviens des coups de froid.. de ma mère qui sortait LA bassine.. déjà j’allais beaucoup mieux.. comme un chien.. façon Pavlov..
je savais que cette bassine.. c’était la farine de lin et le cataplasme.. oh p… unaise le cataplasme.. un supplice..
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Dans la vitrine du pharmacien, y’avait bien la réclame pour la ouate Thermogène avec le truc vert qui crachait le feu.. mais bon.. trop cher.
Mais le cataplasme.. un truc qui te brulait la couenne.. « faut qu’ça soit chaud » disait elle.. tu parles..
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Un cataplasme.. des gouttes de Balsamorinol dans le tarin.. un truc huileux qui te redescendait sur les lèvres..
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et si tu toussais.. les gouttes Nican dans du lait tiède.. un coup à partir à la refile appeler Hughes ou Raoul..
tellement c’était pas bon mais qui te stoppait la toux en moins de deux..
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Y’avait aussi les ventouses.. mais ça.. c’était pour mon père.. ça se terminait invariablement en gueulements..
Un petit pot.. du coton enflammé au bout d’une tige de bois..
On aspire l’air et pof sur le dos.. une succion et voilà une bosse rouge qui se forme dans le flacon..
Le hic c’est que ma mère avait la trouille.. ça merdait.. elle chauffait le verre..
Le pater, aussi serein qu’un chat qui se coince la queue dans une porte.. poussait des gueulements..
Elle revenait.. furie dans la cuisine.. où j’attendais sagement.. je concède en rigolant en mon for intérieur..
Elle me faisait ses mimiques.. « y’ m’fait ch.. TON père.. plus jamais.. c’est la dernière fois », et vaillante comme elle était, elle repartait à l’épreuve.
De toute façon.. le paternel.. il était plus souvent en coup de tabac qu’en mer calme.
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Oui, c’était simple la pharmacopée dans la maison.. des inhalations au Perubore pour le rhume..
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Formocarbine et ultra levure si t’avais mal au boyaux..
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Le top du top étant l’Elexir parégorique sur un sucre si d’aventure t’avais la courante..
Ahhh l’élixir parégorique.. déjà le nom.. je me gargarisais en le prononçant.. il y a un coté grimoire… en plus c’est furieusement bon et c’est vrai que ça fait du bien..
( je crois qu’à l’époque il était très opiacé).
Il m’est arrivé souvent de simuler le mal au ventre juste pour quémander mon sucre.. mon canard.. ma dope
Un parfum divin.. un petit picotement sur la langue..
Je confesse qu’en dehors de la Gitane sans filtre, c’est le seul truc où je fus accro..
Pour le reste.. la pommade Rap pour les bosses.. ça pue.. la pommade Mitosyl pour le reste.. un truc à la jacques Brel.. ça sent la morue… ça pue aussi.
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Mal de tête : aspirine ou mieux Kalmine dans sa boite compartimentée en métal un cachet rond.. dodu.. un truc tout léger.. mais gros à avaler..
Ma mère a souffert durant la guerre et l’occupation.. elle m’en parlait souvent.. c’est là qu’elle a attrapé son « au cas où »..
Elle avait une pharmacie avec les remèdes pour tout.. pour la jaffe.. elle stockait toujours des trucs à becqueter d’avance.. sucre, farine, pommes de terre, riz, pâtes..
il est vrai que ses vingt ans elle les avait passés à crever la dalle.. dans Paname occupé..
Lazarett.. Kommandantur.. Ausweiss.. ah oui, à cette époque fallait des papiers pour sortir…
Elle m’a refilé le virus.. moi aussi je suis « au cas où ».. même pour le bricolage..
Mo me ronchonne « tu fais des stocks » mais quand elle vient.. en me lâchant de sa petite voix.. « Je ne digère pas.. T’AS pas un truc »..
Ou penaude avec son appareil à traiter la vigne.. « regarde, je crois que c’est cassé là.. T’AS pas un truc »..
Oui, dans ma Twingo (et pas dans ma caisse américaine comme chantait Dick).. j’ai repensé à ces vieux médocs.. à ma mère..
à ces époques où je me suis foutu de la grippe de Hong Kong ou de la grippe asiatique .. ou de petaouchnock.. insouciant et heureux le môme..
Punaise.. le coup de blues.. à se prendre un coup d’Elexir Parégorique sur un sucre..
Ça se vend encore parait-il.. mais c’est du dilué… !!! de l’ersatz comme on disait en 40…
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Ah les chiens.. !!! enfin il me reste le ti punch..
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Et si avec Mo nous étions restés à Paname, dans notre douzième.. et si le temps s’était figé dans les années 70
Déjà nous n’aurions pas notre amie l’arthrose…
Et notre désespérante habitude de fréquenter les salles d’attente d’hosto ou de radiologie..
Mes genoux ne seraient pas en titane.. mais en bons os made in Gross Paris.. Façon matériel de guerre…
Et puis bon, faut bien l’avouer.. pas mal de kilos en moins…
Bien sûr moins de vécu.. c’est vrai.. mais bon..
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En fait c’est cette affaire de Charlie Hebdo qui m’a fait repenser à tout ça..
A l’époque je bossais rue du Louvre.. bureau 7 5eme étage.. le 5/7.. comme cette discothèque qui a brulé faisant tant de morts..
Hara kiri n’avait pas encore titré son fameux bal tragique à Colombey..
Mais c’était l’époque des fanzines.. Gotlieb se déchainait..
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L’écho des savanes.. Métal hurlant.. Fluide glacial…

J’avais laissé Blek le roc ou Pecos Bill.. et ça revenait..
Le génie des alpages de F’Murr…

Et puis ce titre qui vit la naissance.. Charlie mensuel devenait hebdo…
Choron et Wolinski dans Hara kiri..
Cette couverture célèbre..qui fut encore dans l’actualité :

« Giscard vend sa femme aux émirs » saisie.. interdiction .. réédition avec trois couvertures différentes..
C’était l’époque de la création , du neuf.. du créatif.. de l’innovant.. bref du bouillant.. du pas politiquement Korrect..
Le mois de mai avait laissé des graines.. ça poussait de partout.. combi Volkswagen.. et virons à Srinagar ou à Goa..

J’étais rentré dans une boite « costard cravate obligatoire pour les hommes et jupes pour les femmes ».
Et là ça prenait l’eau de partout.. des robes.. des jupes courtes.. pas de soutif.. des polos..
Punaise.. l’anarchie.. que dis-je, la chienlit comme nous disait la voix derrière l’écran noir (pas de mes nuits blanches).
Ouais.. si nous étions restés à Paname avec Mo.. en figeant le temps..

Sainté*** et ses poteaux carrés…
Je suis trop vieux.. l’époque d’aujourd’hui ne me plait plus.. Je ne sais pas..
Ouais.. ne restent que ces images du temps d’avant..
Parait que nous sommes des profiteurs.. On bossait 44 ou 45 heures par semaine.. mais on s’en foutait c’était bien..
Et dans notre domaine.. l’informatique c’est bien.. mais faut le chouchouter nuit et jour, le Big Brother
Ouais, trop vieux.. trop vieux
J’aurais dû rester à Paname avec ma douce Mo et appuyer sur pause .
Allez , un petit signe à mon pote de la BA115 . Il se reconnaitra…
Carpe diem
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Marc
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*** NB : les poteaux carrés de Sainté
La finale de la Coupe des clubs champions européens 1975-1976 voit le Bayern Munich remporter sa troisième Coupe des clubs champions. Les Bavarois s’imposent le score de 1-0 face aux Français de l’AS Saint-Étienne, au terme d’une rencontre qui marqua la mémoire collective des supporters de foot français.
La rencontre est globalement dominée par les Stéphanois, surtout la première période pendant laquelle ils touchent par deux fois les montants du gardien allemand Sepp Maier. Ces poteaux avaient la particularité d’être carrés, ce qui était assez rare car ce type d’anciens montants avait été remplacé dans la plupart des stades par des poteaux ronds. Dominique Bathenay et Jacques Santini seront les deux malchanceux à faire heurter le ballon sur ces poteaux, respectivement à la suite d’une frappe lointaine et sur une tête. Le match fut ainsi surnommé du côté français la « finale des poteaux carrés » en référence à ces faits de jeu, alimentant la légende autour de cette rencontre. Pour certains, si les poteaux avaient été ronds, les Stéphanois auraient inscrit ces deux buts mais en réalité, personne ne peut vraiment dire si le ballon serait rentré3.
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