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La boulangerie où j’ai l’usage d’aller était fermée.. en travaux depuis fin juin..
j’allai donc à la maison mère puisque ces deux boulangeries sont jumelées et on y trouve un pain qui est un pain.. des ficelles trop pâlichonnes à mon goût mais qui ne deviennent pas des bâtons de police le soir..
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j’avais fait remarquer ce phénomène à un autre boulanger.. il m’avait rétorqué, outré, que les ficelles étaient faites pour être mangées dans les quelques heures.. pas à garder pour le soir.. eh oui.. un boulanger qui avait dû sécher les cours.. ou un gougnafier bon à crucifier sur son fournil…
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Bref ce matin, la boulangerie usuelle était ouverte.. transformation significative.. espace plus grand.. présentoir des gâteaux en arc de cercle pour faciliter la file d’attente qui en général se prolonge de plusieurs bons mètres dans la rue.. une boutique nouvelle.. une caissière nouvelle.. et l’autre qui me connait et que je complimente pour les travaux.. une caisse nouvelle.. et nous y voilà.
Je prends mes pains habituels.. des « petits Morin » du nom du sous-affluent de la Seine qui coule en Seine et Marne..
(NDLR : en fait il y a le petit Morin et le grand Morin, Morin signifiant marais en briard).
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Je complète avec deux gâteaux et m’apprête à lui tendre mon biffeton de 20 euros.. quand elle m’indique, au bas de la caisse, deux espaces en creux dont l’un muni d’une fente et m’enjoint d’y glisser mon billet… je m’exécute et la machine telle un ministre de Bercy m’aspire goulûment le billet.. pour le recracher aussitôt..
Eh oui, en bon vieux inadapté au modernisme je n’ai pas calé mon billet sur la partie droite de la goulotte.. servant ainsi de guide.. ce qui, avouons le, sans explication, n’est pas d’une évidence biblique..
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(non, cela ne me ressemble pas).
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Fort heureusement, en ces jours d’aout et si tôt, il n’y avait personne derrière moi pour lever les yeux au ciel en pensant que, décidément, les personnes âgées sont un poids pour les actifs qui n’ont pas que ça à foutre , eh oui.. ces actifs fringants greffés du smartphone.. pas patients.. t’inquiète mon gars.. ton tour viendra.. !
( peut être…).
.Je réitère la manœuvre sous l’œil bienveillant de la caissière.. mon billet disparait dans cette fente Darmanesque.. et un cliquetis m’annonce dans le creux d’à coté.. tel un bénitier en plastique avec un plan incliné (pas très bien orienté et donc perfectible) la monnaie qui dégringole comme dans les phantasmes de l’oncle Picsou..
Misère.. au lieu d’entendre le traditionnel.. 30.. 80.. et 20 qui font 100.. voire, comme on disait du temps d’avant, et 20 ça fera la rue Michel.. une machine.. le gros pognon entre.. le petit pognon sort..
J’en suis resté comme deux ronds de flan.. (c’est la cas de le dire puisque nous parlons monnaie).
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En regagnant la voiture après avoir trouvé que c’était pas mal.. j’ai songé à tous ces doigts plus ou moins propres qui allaient caresser cette sébile à flouze..
Z’auraient pu faire balancer un coup de pouit-pouit (désinfectant).. histoire de désinfecter.. ça va devenir rapidement un nid à microbes.. les scrofuleux.. eczémateux.. les ceusses qui ne se lavent pas les mains après avoir été lisbroquer ou couler un bronze..
Beuah.. tu prends ton pain main droite.. tu changes de main pour récupérer ta braise.. et tu reprends ton pain.. le tartinant avec les cadeaux bonux.. beuh..
Ça me fait suer de prendre la carte bancaire sans contact.. j’y suis hostile.. mais là..
Je ne vais quand même pas arrêter de manger du brignolet..
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En tout cas.. quelle modernité!
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Marc
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gougniafier : bon à rien, goujat
flouze : argent. Synonymes : pognon, artiche, braise, blé, radis, oseille, fric, ronds, etc…
lisbroquer : pisser
couler un bronze : faire la grosse commission. Synonyme : poser sa pêche.
brignolet : pain