Je l’ai déjà écrit et narré, pour préserver mes bronches déclarées fragiles par la faculté, mes parents avaient quitté leur gourbi du 3eme arrondissement et s’étaient endettés pour un pavillon très vieux en banlieue.. à cette époque.. la campagne.. des champs.. des chevaux et du lait de vache.. bref un coin à revigorer le lardon..
Ma mère avait, à regret, abandonné ses copines.. etmon père était devenu un banlieusard.. se tapant train et métro pour rejoindre le XIVème.. là où il bossait depuis avant la guerre..
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Gare de la Bastille
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Il y avait le train.. la ligne de la Bastille.. la Bastoche quoi.. puis le métro.. pas beaucoup de durs* dans la journée.. autant dire polope* .. et quelques trains groupés le matin et le soir.. faut bien donner de quoi aller au chagrin* aux masses laborieuses..
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Wagons en bois SNCF.
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Des vieilles locos à vapeur.. des wagons avec de sièges en bois vernis laissés par nos amis d’outre-rhin.. « Nicht Hinauslehnen ».. sur les rebords des fenêtres.. ça j’avais du mal à le lire..
Il y avait un bon paquet de gares à desservir en omnibus.. bien sûr gamin je connaissais tout ça par cœur.. je savais bien qu’en arrivant là où les maisons étaient ras la voie.. Paname n’était pas loin.. et au retour le soir.. quand la ligne arrivait au dessus du vallon de la Marne.. toutes ces lumières.. partout.. à travers le rond dans la buée.. je savais que nous arrivions..
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Chef de gare.
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A cette époque.. il y avait une gare.. avec un chef de gare.. qui possédait un grand terrain un peu plus bas de chez nous.. l’été on le voyait bêcher.. et le dimanche on le retrouvait au stade pour suivre les match de rugby.. il était du sud ouest.. avec cet accent qui roule.. « hile de pute ».
Mais en semaine.. avec sa bâche étoilée sur le cigare.. son sifflet et son bâton ..
Il veillait sur le quai.. vérifiait l’horaire.. les portes claquent.. vlam.. vlam.. un coup de sifflet
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Loco 131
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La 131 lance ses trois hoquets.. puis comme un bœuf à qui on demande un effort.. un grand coup de rein et le convoi s’ébranle..
Les énormes bras.. muscles gigantesques font tourner la roue..
Le gars à la tronche noircie là-haut.. en casquette molle et lunettes échange quelques mots avec le collègue sur le quai..
A cette époque on pouvait expédier des colis depuis la gare.. les vélos pour les vacances..
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Cartes hebdomadaires SNCF, RATP
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Suprême camaraderie du prolétariat.. ils vendaient le dimanche.. la carte hebdomadaire de train.. et la carte hebdomadaire de métro.. ce qui évitait le lundi matin de faire la queue pour avoir sa carte de la RETAP..
Ce fut bientôt ma mission du dimanche.. aller acheter les cartes.. au début je demandais.. « une carte de train et une carte métro Bastille s’il vous plait »…
Et j’ai rapidement découvert qu’il suffisait de dire « un complet ».. ça y était.. j’étais initié.. suffisait d’arriver devant le guichet.. de parler dans l’hygiaphone comme stipulé sur la pancarte..
« B’jour m’sieur.. un complet s’iouplait »… on carme*.. on met les adjas*.. « m’ci m’sieur »..
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Wagons RATP.
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Un complet.. eh oui.. en fait le complet te classait dans la fraternité des travailleurs du matin.. les mêmes qui, après la journée de turbin, se regroupaient le soir dans le fond du wagon à quatre pour taper le carton .. un sac ou une valise posé sur les genoux.
Quand mon père rentrait le soir.. il s’approchait du rebord de la fenêtre, y posait sa montre, son mouchoir bien plié, plongeait dans ses fouilles et déposait sur le mouchoir les quelques pièces qu’il y avait trouvées..Souvent je lui disais.. tu sens le métro..
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Chaque dimanche je pensais au jour où moi aussi je prendrais un complet.. et que je sentirai le métro
Le temps a passé.. pour aller suivre la sixième j’ai dû acheter une carte hebdomadaire de train.. mais juste pour 3 gares.. une misère.. fallait la signer… découper le coupon qu’un préposé en casquette récupérait à la sortie.. mettait ça dans sa sacoche en cuir, grosse apostume sur son abdomen..
Le sable a continué de s’empiler dans son enveloppe de verre..
6ème. .. 5ème.. le bac, le premier.. puis l’autre.. et l’école.. loin de l’autre coté.. à Clichy.. 02h00 de transport le matin.. 02h00 le soir..
Mon tour était venu… mais mon père ne prenait plus de complet depuis longtemps.. suite à un gros problème de santé et un changement dans son travail.. il avait une voiture de l’entreprise..
Et ce dimanche là.. quand je suis descendu chercher un complet étudiant.. j’y ai pensé.. je l’avais imaginé ce jour où je demanderais deux complets.. et qu’on prendrait notre train ensemble..
Un matin.. un courrier bizarre.. la grande muette me rappelait à son bon souvenir.. bien sûr j’avais fait le conseil de révision.. les trois jours… j’avais eu un sursis.. mais là.. on m’appelait sous les drapeaux.. fallait servir la patrie.. pouvaient pas se passer de moi...
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Gare de Lyon.
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Un soir de fin aout.. on a pris un billet de train.. tous les deux.. avec mon père.. pour la Bastoche.. puis gare de Lyon direction Orange… il avait voulu m’accompagner.. quand j’y pense.. le vieux..
C’était pas un complet.. moi j’avais un aller simple et lui un aller retour.. il avait même pris un petit pliant au cas où il n’aurait pas de place pour se poser au retour…
On a pris le train… tous les deux.. silencieux…..
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Titre de transport permission armée
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Quand je suis revenu en permission au bout de 7 semaines de classes..
Il n’y avait plus de Bastoche.. plus de complet.. plus de gare SNCF..
C’était la RETAP.. le RER..
J’avais fait une partie du voyage avec un biffin* qui avait un trou dans sa semelle.. Il habitait la gare juste avant la mienne..
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GareRER Nation.
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05h00 du matin… on a tourné dans la station Nation.. rutilante.. neuve.. y’avait personne avec des gapettes*.. que dalle.. juste nous deux .. paumés, les deux grifftons
On a glissé nos pièces dans le distributeurs en suivant les instructions.. enfilé le ticson* dans la fente.. on a poireauté
Et le truc est arrivé.. sans bruit.. sans escarbilles.. sans vapeur, rien
Que du pchout.. du pchiiii .. pas de gonze en casquette.. une trompe.. pfuuu les portes se ferment..
Il est descendu à sa gare.. « tchao vieux.. courage.. la quille bordel »
Moi j’ai su que quelque chose de grave s’était passé..
Qu’un chapitre venait de se clore à tout jamais..
C’était foutu….
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« Charognard » : aigle sur le calot de l’armée de l’air
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J’avais pourtant mon complet…
… bleu marine avec des galons rouges.. un calot avec le charognard sur la caboche..
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dur : train
polope : nada, rien
chagrin : travail
carmer : payer
mettre les adjas : partir
biffin : soldat
gapette : casquette
ticson : ticket
charognard : aigle, sur le calot de soldat d’armée de l’air
On a acheté deux plantes en plus au dernier moment en rédigeant notre commande pour bénéficier de la livraison gratuite. Elles sont toujours en pot et ne figurent pas sur les photos car on ne sait pas trop où les planter pour l’instant :
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Muhlenbergia capillaris rose.
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Il leur faut du soleil et elles ne doivent pas gêner le passage.
Il faisait beau, avec Mo nous revenions d’un tour sur la grande plage de Plouharnel.. la petite route sinueuse.. étroite entre les massifs d’ajoncs et les zones dunaires..
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A l’origine… en 1973
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Le panzer ronronnait tranquillement.. j’ai mis la radio.. et les Rolling Stones se sont mis à chanter « Start me up »..
Dois je avouer qu’à mon âge qui commence à avancer.. vu que j’en ai largement plus derrière que devant.. je me suis mis à me trémousser et accompagner de la main chaque frappe du batteur.. eh oui.. pauvre Charlie.. si j’osais.. il a fermé l’interrupteur.. Charlie Watts..
Je vais faire la polémique mais je n’ai jamais aimé les Beatles.. je préférais les Rolling Stones..
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La gamberge.. ma jeunesse.. les concerts de Johnny avec Hugues Aufray en première partie…. 5000 balles (balles de 70) la place. j’avais ratiboisé mes éconocroques pour y emmener ma petite amie de l’époque, une douce fleuriste qui portait le prénom d’une chanson des Beatles..
Ben alors le vieux.. tu te trémousses sur ton siège.. comme il y a plus de 60 ans..
C’est vrai que la musique actuelle me laisse de marbre, voire me navre..
Et voilà.. suffit de souffler sur le vinyle.. et Pépère fait sa cure de jouvence.. liposomes super actifs.. Je repense à mon grand père et leur musique.. Rina Ketty.. Fréhel… Jean Sablon… ma mère qui avait manqué se faire écraser pour un autographe de Tino Rossi..
Suis-je devenu comme eux: « ça c’était de la chanson… pas comme votre musique de dingues…!! » Est-ce le cycle normal de l’existence ?..
Pourtant il a des chansons anciennes qui me font monter l’émotion.. sans parler de très anciennes.. qui m’étreignent..
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« Le temps des cerises.. » la commune.. ce fol espoir d’une humanité..
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Et puis plus récemment.. des chansons de Brel… Ferré.. Brassens..
Ca ne peut pas être simplement parce que je nostalgise.. que je me retourne.. et que je revois Pépère.. jeunot.. presque la coupe banane.. écoutant Dylan.. ou s’insurgeant pour Sacco et Vanzetti en écoutant Joan Baez.. parce que quand même..
C’était l’ORTF le contrôle.. Peyrefitte le ministre.. pas une tronche à rigoler… les esgourdes en plein vent… le fond pas drôle.. l’Algérie avec les grands frères de potes qui y partaient et parfois pour le retour…
Cuba.. ce coup là on a serré les miches..
Puis le Viet Nam .. les manifs.. l’agent orange.. les B52..
Sans doute que la musique apportait un petit vent frais..
Quelqu’un avait laissé la porte ouverte.. et ça faisait courant d’air
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Jerry Lee lewis avait semé ses « Great ball of fire.. » ça germait..
Elvis avait mis l’engrais..
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Bob chantait « The times they are a-changin » et Joan « We shall overcome »..
Ce vieux Claude l’a bien mis en musique.. « Mai mai Paris mai.. » C’était parti.. « Quatre boules de cuir.. » les lances patates.. les bidules..
Pas en white satin les nights rue Gay Lussac.. la petite blonde se voyait comme un garçon.. Johnny Cash chantait la prison de Folsom..
Le vent s’était levé.. oublié le poste à œil magique où on écoutait le spoutnik.. passées les émissions de Jean Nohain.. le temps des copains de Filipacchi..
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Le vent venait de l’ouest.. certaines chansons étaient encore interdites… « Le déserteur ».. « Parachutiste ».. mais c’était cuit..
Les graines avaient germé.. le temps des fleurs et du combi VW était venu…
Le basculement était radical.. même si on avait connu la même vie que nos parents.. le courant en 110.. les gogues dans le fond du jardin où on ne trainait pas l’hiver.. la toilette dans la grande bassine.. la cuisinière au Zebracier..
Cette fois.. c’était parti.. fallait que ça change.. Woodstok.. Hendrix.. Joplin..
Les chanteurs sortaient de partout.. comme jonquilles au printemps… et avec les abeilles….
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Le blues de Big Bill Broonzy.. Bob Seeger.. Emmylou.. Leonard..
Tina…’’ simply the best’’.. ??
Alors comment savoir.. sont-ce ces moments de ma jeunesse que je retrouve en écoutant les Stones.. ou est ce plus profond..
L’empreinte a-t-elle été plus viscérale.. un rythme, un battement, gravé dans le dur au fond de moi.. un sillon… les sillons… comme ceux dans le granit des pierres du cairn de Gavrinis…
Bien sur j’ai aimé d’autres musiques.. d’autres chanteurs depuis..
Mais il n’ y a rien à faire.. c’est le canal historique..
En tout cas… quand l’ Ankou viendra.. avec sa carriole.. surtout qu’il ne me mette pas un rap ou je ne sais quoi..
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Mais juste par exemple.. tiens : Ben E King.. « Stand by me… »:
Il pleut.. une pluie façon déluge.. avec option vent..
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la Bretagne nous offre une des facettes que j’aime.. la terrasse est balayée par l’eau.. et les vitres ressemblent aux vitres de l’Abeille Flandre.. un jour de coup de tabac. La journée s’annonce au cantonnement.. avec option ménage.. ou rangements. Mo m’a demandé si je ne pourrais pas d’aventure.. écrire quelques lignes de blog..
En fait j’ai pensé à la mésaventure d’un camarade qui a voulu aller voir son frère à Brest.. un truc de ti-zef.. et qui a eu la fâcheuse idée de vouloir rentrer chez lui.. vers Paname l’autre après midi..
Je rêvassais flemmardement devant la télé.. et mon téléphone posé près de moi vibra le texto..
« Salut.. suis dans le train retour vers Paris.. sommes arrêtés , on a heurté un sanglier.. à plus.. »..
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On a échangé un peu de l’index et du pouce.. et puis.. allo Houston.. ?
Le lendemain matin, je me suis enquis de sa situation..
« J’espère que la SNCF t’a donné un beau morceau de cuissot de sanglier.. ou à défaut un morceau de cuisseau de veau.. oui..l a langue Française est bien particulière.. etc etc.. ».
La réponse ne tarda pas..
« « La SNCF n’a pas pu organiser un barbecue, à mon avis le bestiau était éparpillé façon puzzle. C’était un vieux modèle de TGV, peut-être les nouveaux ont-ils un meilleur pare-buffles.
Chaque passager a quand même eu droit, au bout de 5 heures, à une boîte en carton contenant un généreux « en-cas » : 2 galettes bretonnes, un berlingot de compote, et 50 cl d’eau.
Je ne peux pas en vouloir à la SNCF de l’indiscipline du sanglier. Mais la prise en charge de l’incident manquait un peu de fluidité… 9h30 pour un Brest-Paris c’est mon record… ».
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Je ne voudrais pas paraitre désagréable mais c’est quand même un peu choquant.. des heures de retard pour un bestiau qui traverse la voie..
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. Faudrait-il aussi américaniser notre matériel et importer les locomotives US de l’Union Pacific avec un chasse-bison à l’avant.. Le cheval de fer au secours du Ouigo… Certes, le panneau d’affichage annonce 330 km/h quand on traverse la Beauce et ses éoliennes.. nous sommes loin des flèches de la cathédrale de Chartres.. si chères à Péguy..
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D’accord.. 330.. mais si c’est pour paumer 6 ou 7 plombes en attente du louchebem qui va découper l’animal suicidaire… Moi la Beauce.. c’est plutôt le souvenir des soirs de garde à la base Aérienne de Châteaudun.. les champs de mais.. et les milliers de petits insectes qui collent sur la sueur et cette étreinte qui m’empoigne quand le soleil se couche.. rouge.. mon pote Pascal.. cabot lui aussi.. me disait que ça devait remonter à nos gênes préhistoriques.. quand à l’orée de sa caverne l’homme de Neandertal savait que venait la nuit de tous les dangers.. des craintes.. des peurs.. le temps des légendes et des prédateurs.. Moi.. même devenu vieux.. j’ai horreur de cette période.. quand bien même si la nature sait nous offrir des couchers de soleils flamboyants…
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. c’est le temps du oud.. Cet instrument qui nous vient de l’orient… il fait l’objet d’un épisode dans le feuilleton Kamelott, le roi Arthur se laisse aller à en jouer.. et cette pauvre Guenièvre le supplie d’arrêter car dit-elle « on dirait des enfants qui pleurent ». Il est majeur dans le film « Adieu Gary.. » avec le regretté Bacri..
Musique lancinante.. qui fait monter l’émotion du plus profond ..
Pour en revenir à mon camarade… des plombes à attendre.. en regardant la morne plaine.. le plat pays.. misère.. rajoute le oud..
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.et on a un film Japonais façon « l’île nue ».. noir et blanc.. il ne se passe rien.. les longues herbes se tortillent sous le vent.. et la pauvre dame ploie.. va chercher de l’eau.. elle y va.. elle revient.. elle y retourne… « und so weiter » comme disait Angela.. ah si.. à un moment elle trébuche et fait tomber son seau.. alors son mari lui fait part de son amoureux courroux.. je crois bien me souvenir qu’il lui balance une mandale..
Faut quand même imaginer.. des plombes.. assis dans un train où il ne se passe rien.. dehors, la plaine de la Beauce.. et des éoliennes géantes aux bras immobiles d’impuissance.. ben là .. faut être zen.. moi qui possède la légendaire patience d’un chat à qui on marche sur la queue…
J’ai déjà mis 09h00 de dur pour revenir d’Orange les jours de perm.. mais au moins.. il bougeait le train.. en longs sifflements désespérés..
Naïf, je pensais qu’il y avait un grillage le long des voies du TGV.. comme pour l’autoroute..
J’avoue que, désormais, puisque nous devons prendre le train pour aller en Bretagne.. je ferai une requête à St Antoine le Grand .. et j’investirai dans une boite de Lexomil au cas où..
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Oui Go qu’ils disent..
Ben c’est plutôt à force de rester assis et attendre.. escarre.. go…
« Je est un autre » affirmait l’un, « Connais-toi toi-même » intimait l’autre.
Et alors, quel intérêt? Pourquoi ai-je voulu en savoir plus? Pourquoi me suis-je adressé à ce psychanalyste prétentieux?
Je fais des cauchemars depuis que je suis tout petit. Ils me laissent une impression terrifiante sans que je garde le moindre souvenir de leur contenu au réveil. Cependant, je m’y habitue plus ou moins et dans la journée je n’y pense plus. Il ne m’en reste comme désagrément qu’un sourd mal de tête permanent probablement causé par la lumière trop vive du bureau qui agresse mes yeux fragiles.
Je suis quelqu’un de très ordinaire, comptable dans une société d’import-export de cercueils. J’aime passer à l’heure du déjeuner dans le dépôt de marchandises. Puis-je avouer qu’il m’arrive même de les essayer? Je me dis qu’un jour ce sera mon tour, et puis j’aime l’odeur du taffetas, du bois et du vernis. Je sais bien que c’est un peu bizarre mais cela me procure un profond sentiment de quiétude et soulage mon mal de tête. Il faut dire de plus que je n’ai jamais bien faim dans la journée, la cuisine de la cantine est infâme.
Je n’ai pas de petite amie en ce moment. Les relations que j’ai pu avoir avant ont toutes tourné court sans que je sache comment ni pourquoi. Les filles que j’ai connues ont apparemment disparu de ma vie sans me laisser d’explications. Peut-être que je criais la nuit pendant mes cauchemars?
J’ai ma séance de psychanalyse tard ce soir. Je suis allongé sur le divan. Dehors, le ciel d’hiver vire déjà au noir. L’homme de l’art, assis dans un fauteuil derrière moi, s’apprête à me faire revivre mes cauchemars sous hypnose pour les « désamorcer »…
La séance ne lui a pas porté chance, à ce psychanalyste. Quelle idée d’avoir amené à ma conscience mes cauchemars de la nuit? Il n’a plus l’air aussi prétentieux, mais les morts ont rarement l’air prétentieux, exsangues avec deux trous rouges au creux du cou.